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22 février 2011

Un brin de verdure

Barbara_Pym538Un brin de verdure
Barbara Pym

Christian Bourgois éditeur, collection titres juin 2007

ISBN : 978-2-267-01928-5

(A few green leaves) chez Hilary Walton en 1980

C’est encore à mon ami John que je dois cette pépite de la littérature anglo-saxonne.
Je n’avais même jamais entendu parler de Barbara Pym, aussi n’ai-je pas été surprise en découvrant son triste parcours à la lecture de la préface signée René de Ceccaty. Née en 1913, elle devient rapidement une romancière dont le succès culmine au cours des années 1950. Son éditeur fidèle, Jonathan Cape,  la désavoue brusquement en 1963 et n’acceptera plus aucun manuscrit, la  laissant désemparée mais pas découragée, puisqu’elle continue d’écrire malgré l’isolement du silence autour d’elle. René  de Ceccatty résume ainsi sa situation : "à partir de 1965, il y a désormais deux écrivains : l’un en pleine activité et maudit ; l’autre reconnu mais rejeté dans un passé vaguement désuet… (…) Elle persiste(…)pour le plus grand bonheur de ses lecteurs… Rares sont les exemples d’une telle ténacité, que l’on pourrait appeler fidélité à soi-même."



Après  la lecture de ce  roman, j’avoue que je suis satisfaite de l’éclairage apporté par cette préface. Non que l’écriture en paraisse si absconse, au contraire. L’art de Barbara Pym est de dérouler son histoire avec la simplicité d’une conversation entre amies d’enfance, sans façon… Car là est tout son sujet. Nous entrons  dans l’intimité de la perception d’une héroïne, Emma, dont les caractéristiques s’affichent comme une sorte de double de l’auteure.
Emma est en effet, malgré sa trentaine engagée, toujours célibataire, plus préoccupée de ses analyses d’anthropologue que de mondanités. Ressentant un besoin d’isolement afin d’écrire sa dernière parution à venir, elle se réfugie dans la maison de sa mère, au cœur d’un village perdu dans le Shropshire, région natale de Barbara Pym.
À côtoyer les habitants de ce village hors du temps, nous entrons progressivement dans une micro-société plus proche de l’univers de Jane Austen que des  turbulences des années 1970. Si parfois on apprend qu’Emma peut conduire une voiture, si les liaisons téléphoniques et la télévision existent bel et bien dans le mode de vie d'Emma, l‘intérêt que celle-ci manifeste pour les habitants du coin constitue la trame du récit. Les relations établies autour de la paroisse anglicane tenue par Tom, le pasteur veuf et bel homme solitaire, secondé par  sa sœur Daphné vieille fille frustrée cherchant désespérément une porte de sortie,  les rituels conviviaux établis par les deux bigotes de service miss Lee et miss Grundy, ou les excentricités d’Adam Prince, prêtre défroqué reconverti en guide gastronomique finissent par devenir la trame du récit.…toutes ses observations et ses remarques, qui deviennent son nouveau sujet d’études tissent le canevas de ce roman où il ne se passe rien… Si ce n’est justement toute la vie de ces personnages ordinaires.

Il n’y a effectivement pas là matière à créer un succès populaire, pas de brillance intellectuelle  ni de paillettes triviales, pas d’exotisme dépaysant ni d’intrigues haletantes pour lecture de plage. Ce qui peut expliquer la désaffection dont Barbara Pym a souffert. Mais à tous les lecteurs qui recherchent le tissage d’un lien intime et discret à établir avec le livre qu’ils ont entre les mains, ceux d’entre –vous qui apprécient d’y reconnaître un sentiment éprouvé, la solitude, l’attente vaine d’un événement majeur, le désir de reconnaissance… Ce roman s’adresse à vous. En quelques soirées ou une après-midi pluvieuse, il se révélera un compagnon discret mais sincère, un de ces  condisciples, confident du temps du pensionnat à qui l’on consacre une visite de nostalgie.      

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Commentaires
G
C'est vrai que la qualité première de cette écriture, c'est de mettre en lumière sans avoir l'air d'y toucher tous les ferments de ces mini drames quotidiens qui tissent nos vies. Et ce petit côté anodin nous renvoie à nos travers, en général. Même si alors, le folklore village campagnard anglais nous donne un alibi de distanciation.
I
Je suis une inconditionnelle de Barbara Pym. J'ai lu presque tous ses livres quand j'étais ado. Je trouve qu'elle mérite qu'on la redécouvre car sous couvert de ces petits villages anglais et de ces histoires de vieilles filles amoureuses du pasteur, la critique de la société est caustique et acerbe. Drame de la jalousie, de la solitude extrême... les thèmes sont forts et représentatifs de ces petits villages où tout n'est qu'apparence. J'adore !!!
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